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Sortie du DVD de Notre Monde

Notre Monde Notre Monde (2013, 119') un film de Thomas Lacoste
Rassemblant plus de 35 intervenants, philosophes, sociologues, économistes, magistrats, médecins, universitaires et écrivains, Notre Monde propose un espace d’expression pour travailler, comme nous y enjoint Jean–Luc Nancy à « une pensée commune ». Plus encore qu’un libre espace de parole, Notre Monde s’appuie sur un ensemble foisonnant de propositions concrètes pour agir comme un rappel essentiel, individuel et collectif : « faites de la politique » et de préférence autrement.
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© Passant n°49 [juin 2004 - septembre 2004]
par Emmanuel Tibloux
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De nouveau c’est la nuit


De nouveau c’est la nuit dans n’importe quelle province un dimanche à sortir du monde

On prend de ses nouvelles dans le journal une guerre un fait divers une défaite en championnat

Et dehors est-ce encore le monde appelle

Nul doute dans la nuit du monde

En finir encore avec la vie des morts

A l’écroulé vieux démoli dire qui nous sommes

Quand nous entrons en désespoir

Dehors c’est un pré

C’est dans la fenêtre de la chambre un pré de trois carreaux sur trois

A1, A2, A3, B1, B2, etc.

Peut-être cent pas de long sur autant de large

Pour qui se souvient du pas des hommes

Dire qui nous sommes quand nous errons dans les villes et les champs

Sans savoir ce dont nous manquons

Est-ce l’amour est-ce la chair

A moins que manquer soit notre lot

Qui d’autre que toi pour entendre ça vieux démoli

B2 carreau central portion représentative du pré

Herbes hautes par endroits rares ailleurs

Mottes de terre

Sensation de la matière humide

Quand la chair faute d’autre chose appelle de l’angle d’une rue d’un sillon bourbeux et qu’on se meurt à la fenêtre d’où tu me regardes partir

C’est à l’angle du boulevard Rochechouart et de la rue des Martyrs

Dehors c’est un pré sans dieu ni berger

Te souviens-tu vieux démoli de cette ancienne époque

Mettons ce premier jour d’octobre où j’arrive mes vingt ans tes combien ton sourire d’avant la ruine que je touche un mort

Je sais lire écrire le football le tennis jouir un peu dans le ventre des filles

Voilà ce qu’avant la ruine je sais

Autre lieu même nuit

Avant la ruine tu es dans le living-room face à la bibliothèque tout en buste d’écriture

La main court dans la littérature

C’est dans la fenêtre d’un train ta vie qui file à l’ennui

Un jour je suis à Amsterdam

James Dean Hölderlin même combine

Se faire couper l’oreille dans le quartier rouge

Et tu ris au téléphone

Bâtiments désaffectés d’usines

Entrepôts vides

La France en est pleine

Pendant la ruine

Assez de ruine

Il y a les chutes sur le parquet la tête dans les échardes la main qui bave à l’encre tremblée les deux mêmes mots toujours les mêmes pas même une phrase un mot d’auteur rien que le nom précis d’une maladie

Que tu appelles lady

Dehors c’est une nuit sans lutte ni progrès

Après j’ai ton front sur mes lèvres dans le lit pâle d’une chambre bleue

Autre lieu même nuit

La première fois que je touche un mort

C’est dans la fenêtre de la chambre une rue de Paris

A l’angle du boulevard Rochechouart et de la rue des Martyrs

D’où chaque soir tu me regardes partir

Allons nous échouer ma vie si tu veux bien

Garçon une bière non pas de mars

Ordinaire

Tu suivras tes désirs comme un chien

Où sont-elles les belles sténodactylographes ?

On en fera des livres beaux comme la misère

Dehors c’est une rue désertée par l’aventure

Beaux comme la misère avec des revenants qui reviennent des bourreaux qui appellent et des corps au kilo

Te souviens-tu ma vie de cette ancienne époque ?

Par la fenêtre de la chambre du vieux démoli

Quand j’étais le jeune homme

Le vieux démoli râle dans son dialecte qui revient depuis le lit de sa mère morte dans lequel il dort chaque nuit comme après dans le lit pâle de la chambre bleue

Son visage sur mes lèvres

Quand j’étais le jeune homme qui revenait avec un livre beau comme la misère

Sa mère folle dans son dialecte

Autre lieu même nuit

Le moment est venu vieux démoli

C’est dans la fenêtre de la machine

Du discernement cruel

Une nuit sans opacité ni matière

De se déprendre des ravages aimés de l’adolescence

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De cette première personne joli support des douleurs

format police outils

Il n’y a pas de lit pâle dans la chambre bleue mais

tableau fenêtre

Rigide et froid

travail

Un corps

là.

Emmanuel Tibloux

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